Production de Spectacles
Gabriel Bacquier

Gabriel Bacquier

Baryton
              Gabriel Bacquier naît à Béziers le 17 mai 1924. Son père possédait un trésor dont il eut vite fait son miel : un phonographe et des disques 80 tours qu’avaient enregistrés les grands chanteurs d’alors. Le garçon clamait à tue-tête sur le perron du casino de Valras, lorsque la plage était vide, les airs d’opéra qu’il avait entendus. Mais il était attiré surtout par le dessin et fut inscrit à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier. Le STO mettait à cette époque la main sur ceux qui étaient en âge d’aller travailler en Allemagne. Prudemment, les parents de Gabriel Bacquier le firent entrer aux chemins de fer où ils étaient eux-mêmes employés. Assujetti aux trois-huit, le jeune Bacquier, qui faisait partie de la jeunesse gaulliste, suivit, pour sortir de cette vie difficile, ses camarades qui se rendaient chez un professeur de chant de Béziers, Mme Bastard, laquelle ne tarda pas à discerner chez ce jeune homme des qualités peu communes. Elle proposa à ses parents de présenter son élève au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris lorsque la guerre serait terminée. C’est ainsi qu’en 1945, Gabriel Bacquier se retrouva à Paris, déjà marié et bientôt père d’un garçon, Georges.
 
            Il obtint ses prix en 1950 pour trouver un chemin qui n’était pas tracé d’avance. Après des années de dur travail et d’incertitudes, après s’être produit au cabaret et dans les salles de cinéma, il entra dans la troupe du Théâtre royal de La Monnaie, à Bruxelles, dont le rythme exigeant effectuait une sélection impitoyable. En 1956, il entrait à l’Opéra-Comique puis à l’Opéra de Paris qui possédaient à l’époque une troupe à laquelle Gabriel Bacquier dit qu’il doit tout. Entre-temps, il avait divorcé et s’était remarié : un second fils naquit de cette union, Patrick.
 
           Remarqué par Gabriel Dussurget, fondateur du Festival d’Aix-en-Provence et directeur artistique de l’Opéra de Paris, Gabriel Bacquier chante dans cette maison le rôle de « Scarpia » aux côtés de Renata Tebaldi ; puis Gabriel Dussurget lui confie le rôle-titre de Don Giovanni au Festival d’Aix, rôle qu’il aborde le 9 juillet 1960, pour la première fois en italien, sous la direction d’Alberto Erede. La télévision était présente : c’est ainsi que commence la magnifique et longue carrière de Gabriel Bacquier, premier « Don Giovanni » français à Aix.
 
            Admirable mozartien, défenseur des ouvrages classiques (Gluck, Rameau…), Gabriel Bacquier est l’interprète idéalement ambigu des « Scarpia », « Iago », touchant de « Germont »,  halluciné de « Golaud », époustouflant de « Falstaff ». Il parcourt le monde et obtient des succès qui confinent au triomphe : Rameau, Gluck, Mozart, Rossini, Berlioz, Bellini, Donizetti, Verdi, Puccini, Ambroise Thomas, Léo Delibes, Gounod, Massenet, Gustave Charpentier, Debussy, Paul Dukas, Maurice Ravel, son répertoire est immense, sans compter l’opérette dont il fait ses délices, particulièrement avec les Viennois (Johann Strauss et Franz Lehar) et, surtout, Offenbach. Ses points d’attache principaux à partir desquels il rayonne sont le Metropolitan Opera de New York, l’Opéra de Paris, la Royal Opera House Covent Garden à Londres et la Staatsoper de Vienne. La Scala de Milan, le San Carlo de Naples, le Liceo de Barcelone, le Colon de Buenos Aires, San Francisco, Seattle, Prague, Berlin, Munich, Monaco, etc…, comme les villes françaises (Marseille, Lyon, Strasbourg, Rouen, Nantes, Tours, Bordeaux, Toulouse, Nice, etc…) ne peuvent faire l’économie de Gabriel Bacquier.
 
            Il chante la mélodie en véritable diseur-chambriste, renvoyant de l’une à l’autre poésie et musique, tel les aèdes d’antan qui ne les dissociaient jamais. Ses récitals restent inoubliables du Carnegie Hall (New York) au Théâtre de la Ville (Paris).
 
            Il crée des œuvres de Daniel-Lesur, Maurice Thiriet, Jean-Michel Damase, Marc Berthomieu, Lucie Robert-Diessel, Michel Decoust…
 
            Notons qu’il a toujours été fidèle à la chanson qu’il ne cesse de défendre et d’enregistrer.
 
            Citons ses enregistrements fétiches : un récital de mélodies avec, pour partenaire, Jean Laforge, et un récital d’airs d’opéra dirigé par Jésus Etcheverry, ces deux disques distribués par Universal. Puis des intégrales célèbres : la Damnation de Faust (EMI 1970) de Berlioz,  Pelléas et Mélisande de Debussy (GOP 1969), La Favorite (DECCA 1974), les trois opéras « italiens » de Mozart (1962, 1968, 1971, 1974, 1979), les Contes d’Hoffmann d’Offenbach (DECCA 1972), les Verdi dont Falstaff en vidéo (DGG 1979), pour n’en citer que quelques- unes.
 
            Gabriel Bacquier a reçu de nombreuses distinctions : chevalier de la Légion d’Honneur, officier dans l’Ordre du Mérite, commandeur des Arts et Lettres (France et Monaco). Il a été deux fois honoré par les Victoires de la Musique (1985 / meilleur artiste lyrique et 2004 pour l’ensemble de sa carrière). En 2004 et 2013, il reçoit, pour  l’ensemble de sa carrière, l’Orphée d’Or Herbert von Karajan de l’Académie du disque. De multiple prix du disque et l’International Fidelio Medal of de Directors s’ajoutent à ce palmarès. Une locomotive du Shuttel porte son nom.
 
            Gabriel Bacquier est le co-auteur, avec Sylvie Oussenko, son biographe (Gabriel Bacquier, le Génie de l’interprétation, MJW 2011), d’un ouvrage sur Verdi (Eyrolles 2013) et a rédigé de nombreuses préfaces.
 
            Devenu veuf, il épouse, fin 2013,  l’auteur et cantatrice Sylvie Oussenko.
 
            L’année 2014 est fertile en événements qui l’honorent pour fêter ses quatre-vingt-dix ans : Béziers au Théâtre des Franciscains, invité par son directeur Jean-Bernard Pommier, où se succèdent rétrospective de sa carrière et concert, Aix-en-Provence où il inaugure la rue Gabriel Dussurget le 27 juin, cela suivi d’une exposition retraçant sa brillante carrière, Villers-sur-Mer où il montre la vaillance de sa voix et sa disponibilité pour servir les compositeurs contemporains.
 
            Gabriel Bacquier consacre beaucoup de temps à la pédagogie fondée sur le travail du texte poétique, lequel est toujours premier car source d’inspiration pour le compositeur ! Approche originale du comédien chanteur qu’il a toujours été.
 
            Des regrets pourtant : n’avoir pas exploré pour les servir les répertoires germanique (Wagner – il donna quelques représentations, à l’Opéra de Paris, de Tannhäuser, rôle de « Wolfram » remarqué par André Pernet, Richard Strauss, Mahler…) et russe dans les langues originales (il chanta Boris Godounov de Moussorgski en français, ainsi que des extraits du Prince Igor de Borodine).
 
            On connaît peu Gabriel Bacquier dans l’oratorio. Pourtant, à l’aube de sa carrière, en 1950, à Notre-Dame de Paris, dirigé par le Rd Père Emile Martin, il chanta le Requiem de Fauré, avec un recueillement et une ferveur fondés sur la connaissance approfondie du texte liturgique. Il existe un enregistrement de ce concert.
 
            Gabriel Bacquier aime peindre et prévoit une exposition de ses œuvres.
            Il aime à jardiner et à satisfaire le moindre désir de sa chatte « Desdémone » dite « Poupoune », rejoignant ainsi Baudelaire qui voyait dans le Chat « l’orgueil de la maison ».